Micro-algues, carburants de synthèse, éolien flottant : Saint-Nazaire investit l’industrie de demain

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Micro-algues, carburants de synthèse, éolien flottant : Saint-Nazaire investit l’industrie de demain

Le bassin nazairien innove et se transforme.

La rencontre “Territoires d’industrie”, organisée le 23 avril 2025 à la base sous-marine de Saint-Nazaire, a permis de faire le point sur les dynamiques industrielles en cours et les projets d’avenir. Elle a mis en lumière des initiatives locales ambitieuses, dans les secteurs portuaire, énergétique ou encore environnemental, et souligné la force des coopérations à l’échelle du territoire.

J’ai eu le plaisir d’y assister, et cette soirée m’a permis de mieux comprendre les logiques industrielles à l’œuvre autour de nous. Voici ce que j’en retiens.

Saint-Nazaire mise sur les micro-algues : des micro-organismes aux applications industrielles, environnementales… et spatiales

Longtemps confinées aux laboratoires ou à l’univers des compléments alimentaires, les micro-algues intéressent aujourd’hui de plus en plus d’acteurs industriels, notamment sur le territoire nazairien. Invisibles à l’œil nu, ces organismes végétaux unicellulaires sont capables de capter le CO₂, de traiter certaines eaux usées, de produire des biocarburants, ou encore de fournir des molécules utiles à la santé ou à l’industrie.

Leur potentiel est immense, et plusieurs projets locaux, régionaux et européens ouvrent la voie à des usages concrets et innovants, qui trouvent pleinement leur place dans la dynamique actuelle de transition écologique.

Fonctionnement d’un photobioréacteur à micro-algues – recyclage du CO₂ et valorisation énergétique.

Comment fonctionnent les micro-algues ?

Comme toutes les plantes, les micro-algues réalisent la photosynthèse : elles utilisent la lumière du soleil pour transformer le dioxyde de carbone (CO₂) en oxygène, tout en produisant de la biomasse (matière organique). Mais contrairement aux arbres, elles peuvent être cultivées en très grande densité dans des bassins ou des tubes appelés photobioréacteurs, et pousser rapidement, sans utiliser de terres agricoles.

Elles peuvent aussi valoriser :
  • des fumées industrielles riches en CO₂
  • de la chaleur fatale (énergie perdue par les machines ou les cheminées industrielles)
  • des eaux usées ou des effluents agricoles

Des applications concrètes à Saint-Nazaire et dans la région

À Saint-Nazaire et dans sa région, les micro-algues suscitent un intérêt croissant pour leurs nombreuses applications : captation du CO₂, valorisation de la chaleur fatale, épuration des eaux usées, ou encore production de molécules d’intérêt pour la santé ou les biocarburants. Plusieurs projets en cours illustrent le potentiel local de cette filière.

Saint-Nazaire à l’origine d’un projet innovant : transformer les fumées industrielles… en micro-algues

Peut-on capter le CO₂ d’une cimenterie pour nourrir des micro-algues ? C’est le pari du projet CimentAlgue, imaginé avec le soutien de l’entreprise AlgoSource, basée à Saint-Nazaire, et du laboratoire GEPEA (Université de Nantes / CNRS).

L’idée : valoriser à la fois le CO₂ et la chaleur perdue d’un site industriel pour cultiver des micro-algues riches en protéines et en composés d’intérêt. Ce démonstrateur, testé dans une cimenterie du couloir rhodanien, a été entièrement conçu et développé en Loire-Atlantique, dans les locaux d’AlgoSource et à AlgoSolis, plateforme technologique installée à Bouguenais.

Au cœur du système : des photobioréacteurs qui utilisent la chaleur des fours et le CO₂ des fumées pour stimuler la croissance de spiruline. Résultat : une biomasse valorisable, et un procédé qui pourrait être transposé à d’autres industries de l’estuaire.

Ce projet, soutenu par l’ADEME, illustre le savoir-faire du territoire nazairien dans l’économie circulaire et les technologies vertes. Une belle synergie entre recherche, innovation industrielle… et ambition environnementale.

Projet de capture du CO₂ par micro-algues dans une cimenterie en Loire-Atlantique
Vue de photobioréacteurs contenant des micro-algues vertes en culture, utilisés pour la captation de CO₂ et le traitement des eaux usées

ZENI et l’Université de Nantes : les micro-algues au service de l’épuration des eaux usées

À Saint-Herblain, en Loire-Atlantique, l’entreprise ZENI travaille depuis plusieurs années à une solution biologique innovante : utiliser les micro-algues pour dépolluer les eaux usées.

Un principe simple, naturel… et redoutablement efficace

Les micro-algues ont la capacité d’absorber les nutriments et les polluants présents dans les eaux usées : azote, phosphates, métaux lourds, composés organiques… En les faisant croître dans des bassins spécialement conçus, ZENI exploite ce pouvoir épurateur pour :
  • réduire la charge polluante des effluents,
  • produire une biomasse valorisable en énergie ou en engrais naturel.

Ce procédé est économe en énergie, sans ajout de produits chimiques, et permet de récupérer l’eau épurée pour d’autres usages (arrosage, usages industriels…).

Une coopération étroite avec la recherche nantaise
Le projet est développé en lien étroit avec le laboratoire GEPEA (Université de Nantes / CNRS), spécialiste des bioprocédés appliqués à l’environnement. Ensemble, ils testent différentes souches d’algues locales, adaptées aux conditions climatiques régionales, et optimisent les photobioréacteurs.

Objectif à moyen terme
Proposer une solution industrialisable pour les stations d’épuration ou les sites industriels du territoire, notamment dans les secteurs agroalimentaire, cosmétique ou chimique.

Une piste d’avenir pour les territoires littoraux
Cette technologie douce est particulièrement pertinente sur les zones côtières, où la préservation des milieux aquatiques est essentielle, et où la pression environnementale augmente.

🔗 Source : [Projet ZENI – GEPEA / AlgoSource / Université de Nantes (cf. colloques AlgoBio et documents ADEL 2024)]

Et si les micro-algues devenaient le carburant de demain ?

C’est précisément l’objectif des projets de biocarburants dits de "troisième génération", actuellement expérimentés en Loire-Atlantique. Contrairement aux agrocarburants traditionnels (colza, maïs…), les micro-algues n’entrent pas en concurrence avec les cultures alimentaires. Leur culture ne nécessite pas de terres agricoles, se fait en circuit fermé, et valorise des ressources souvent gaspillées comme la chaleur fatale ou le CO₂ industriel.

À Saint-Nazaire et dans son agglomération, plusieurs initiatives sont en cours pour explorer cette piste innovante :

  • Le GEPEA (laboratoire rattaché à l’Université de Nantes, au CNRS, à l’IMT Atlantique et à ONIRIS) développe, sur le site de Saint-Nazaire, des photobioréacteurs de nouvelle génération capables de produire de la biomasse algale à haut rendement.

  • Sur le site de AlgoSolis, plateforme technologique unique en France, les chercheurs testent différentes souches d’algues capables de produire des lipides, précurseurs de carburants alternatifs pour l’aviation, la marine ou le fret routier.

Objectif : produire, d’ici quelques années, un carburant local, renouvelable et décarboné, utilisable dans les secteurs difficiles à électrifier (avions, poids lourds, navires).
Vue des photobioréacteurs à AlgoSolis, plateforme de recherche sur les micro-algues
Micro-algues et santé : recherches du CHU de Nantes sur les compléments alimentaires et les effets secondaires des traitements

Micro-algues & santé : des perspectives prometteuses pour les patients traités par chimiothérapie

Les micro-algues ne se contentent pas d’absorber du CO₂ ou de produire de l’énergie : elles s’invitent aussi dans le domaine médical. Depuis plusieurs années, des travaux sont menés en Loire-Atlantique autour de leurs propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et immunostimulantes. Ces recherches ouvrent des perspectives pour soulager les effets secondaires de la chimiothérapie, tels que la fatigue, les troubles digestifs ou encore la baisse d’immunité.

Des expérimentations concrètes

Le CHU de Nantes, en partenariat avec le laboratoire GEPEA (Université de Nantes - CNRS) et des structures comme AlgoSolis, explore l’usage de certains extraits de micro-algues pour améliorer la tolérance des traitements anticancéreux.

Les chercheurs s'intéressent notamment à des molécules naturelles comme la phycocyanine ou les acides gras oméga-3 produits par certaines souches, connues pour leur capacité à limiter les réactions inflammatoires.

Une alternative naturelle à surveiller de près

Ces compléments issus de micro-algues pourraient à terme être intégrés dans des protocoles de soins de support, sous forme de nutraceutiques ou de compléments alimentaires prescrits en accompagnement des traitements lourds.
Cela permettrait une meilleure qualité de vie pour les patients, avec une approche plus respectueuse de l'organisme.

Les micro-algues dans l’espace : une solution pour recycler l’air, l’eau, l'urine… et les déchets

Dans le cadre du programme spatial européen MELiSSA (Micro-Ecological Life Support System Alternative), les micro-algues jouent un rôle central pour permettre la vie humaine lors de missions spatiales de longue durée. L’objectif : recréer un écosystème fermé, capable de :

  • Recycler le dioxyde de carbone émis par les astronautes en oxygène respirable ;

  • Épurer l’eau issue de déchets (urine, eaux grises…) ;

  • Produire de la biomasse comestible riche en protéines.

Spiruline et Chlorella sont notamment testées comme micro-algues candidates pour intégrer ce circuit biologique autonome.

Ce programme, piloté par l’Agence spatiale européenne (ESA), s’inspire du fonctionnement d’un écosystème terrestre mais miniaturisé pour tenir dans des modules spatiaux. Ces recherches ouvrent également des pistes pour des applications sur Terre, notamment dans les environnements isolés ou extrêmes.
Astronaute dans une ferme spatiale – Recyclage par micro-algues (programme MELiSSA)

Les carburants de synthèse : une solution concrète pour les transports lourds et l’industrie

Et si l’on remplaçait le pétrole par… du CO₂ recyclé et de l’hydrogène vert ? C’est précisément l’ambition des carburants de synthèse, aussi appelés e-carburants. Issus d’une réaction entre du dioxyde de carbone capté (par exemple dans l’industrie ou les cimenteries) et de l’hydrogène produit à partir d’électricité renouvelable, ces carburants peuvent alimenter avions, navires ou camions, sans nécessiter de motorisations entièrement nouvelles.

Un enjeu crucial
Contrairement à l’automobile, l’électrification est difficilement envisageable pour les transports lourds. Les carburants de synthèse apparaissent donc comme une alternative crédible et complémentaire, capable de décarboner massivement l’aviation ou la marine marchande.

Et cette transition commence ici, dans l’estuaire de la Loire
Grâce à une mobilisation collective, de nombreux projets émergent, portés par des acteurs publics et privés, tous engagés pour une industrie plus propre et innovante.

Voiles rigides : une innovation nazairienne pour décarboner le transport maritime

À Saint-Nazaire, les Chantiers de l’Atlantique ont développé une technologie unique : SolidSail, une voile rigide en composite, repliable et automatisée. Destinée aux grands navires, elle permet jusqu’à 40 % de réduction de carburant, avec un mât basculant de 66 m facilitant les manœuvres.

Cette innovation 100 % locale incarne la transition énergétique du maritime, un secteur difficile à électrifier.

Des projets concrets déjà en mer

  • Le Neoliner, navire de commerce hybride propulsé par SolidSail, sera mis à l’eau prochainement.

  • La startup CWS, implantée à Saint-Nazaire, conçoit également des navires à propulsion vélique.

  • Les paquebots eux-mêmes pourraient être partiellement propulsés par ces voiles dans les années à venir.

Grâce à ces projets, l’estuaire ligérien devient un pôle d’innovation maritime reconnu.
Voiles rigides SolidSail : innovation maritime décarbonée à Saint-Nazaire
représentation réaliste d’un quai industriel dédié à l’éolien offshore

Le projet EOLE : l’estuaire en première ligne pour l’éolien flottant

À l’horizon 2026, un chantier titanesque verra le jour sur la rive sud de l’estuaire de la Loire. Porté par le Grand Port Maritime de Nantes – Saint-Nazaire, le projet EOL (pour Éolien Offshore Loire) prévoit la création d’un quai de 1 km de long, capable d’accueillir les plus grandes turbines éoliennes flottantes du monde.

Ce nouvel espace portuaire jouera un rôle clé dans l’assemblage des mâts, nacelles et pales avant leur transfert vers les zones en mer. Certaines machines dépasseront les 300 mètres de hauteur, pour une capacité de production de 21 MW par unité, soit de quoi alimenter 20 000 foyers à elles seules.

Ce projet d’envergure s’inscrit dans la stratégie de développement des énergies renouvelables en France, et renforce la position de la façade atlantique comme pôle industriel majeur pour la transition énergétique.

Réduire l’empreinte carbone portuaire : une coopération active

Sur la façade atlantique, le port de Saint-Nazaire n’est pas en reste dans la transition écologique. Une dynamique collective s’est engagée pour réduire les émissions de CO₂ générées par les activités portuaires, souvent énergivores. Ce travail repose sur une alliance d’acteurs publics et privés : EDF, TGO (Terminal du Grand Ouest), Sea Invest et Somaloir, gestionnaires de terminaux portuaires. Ensemble, ils œuvrent à la modernisation des installations.

Objectifs visés :

– Diminuer la consommation énergétique des équipements (grues, engins de manutention, éclairage, etc.)

– Optimiser l’efficacité énergétique des bâtiments (bureaux, entrepôts, zones techniques)

– Réduire les émissions liées aux navires à quai (alimentation électrique à quai, logistique optimisée)

– Mutualiser certaines infrastructures ou services pour limiter les doublons énergivores.

Ces efforts s’inscrivent dans un cadre plus large de décarbonation industrielle, en lien avec l’association ADEL (Décarbonation Loire Estuaire), qui réunit une vingtaine de projets et plus de 25 partenaires autour de la résilience énergétique du territoire.

Côté port, EDF et les acteurs des terminaux (TGO, Sea Invest, Somaloir) travaillent ensemble à la réduction des émissions sur les bâtiments, équipements et quais de Saint Nazaire
Littoral de Saint-Nazaire – vue côtière depuis un sentier surplombant une plage avec rochers, végétation et océan Atlantique à marée basse

Coopération locale et transition énergétique : le rôle structurant de l’association ADELE

Pour réussir la transition écologique de l’estuaire, il ne suffit pas d’innover individuellement. Il faut coopérer, mutualiser, penser à long terme. C’est tout le sens du travail mené par l’association ADELE (Décarbonation Loire Estuaire), qui fédère aujourd’hui plus de 25 partenaires publics et privés engagés pour décarboner durablement notre territoire.

Une dynamique collective ambitieuse

ADELE coordonne 20 projets structurants autour de trois grands axes :
  • L’optimisation des ressources énergétiques (partage de l’électricité, du gaz, de la chaleur fatale…),

  • La résilience face aux dérèglements climatiques,

  • Le renforcement de la coopération industrielle dans l’estuaire.

Grâce à cette approche territoriale inédite, des synergies concrètes émergent entre acteurs industriels, collectivités, exploitants portuaires et chercheurs.

Clôture d'une soirée stimulante sur les transitions industrielles

Organisée à la base sous-marine de Saint-Nazaire, cette soirée a permis de mieux comprendre les transformations industrielles et environnementales en cours sur notre territoire. Les échanges ont souligné l’ampleur des initiatives engagées, la diversité des acteurs impliqués et les perspectives concrètes qui se dessinent.
J’ai été ravie d’y assister et de découvrir autant de projets porteurs de sens.

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Valérie FERRAGU

Dirigeante - Titulaire de la carte professionnelle

Loire-Atlantique (44)

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Écrit & publié le 28/06/2025 par
Valérie FERRAGU

--> Juriste passionnée, Professeure de droit à l’IUT
--> Agent immobilier & Fondatrice de LA BAULE IMMO ici et ailleurs

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