
Expropriation par l’État : ce qui change pour les propriétaires depuis la décision du 9 octobre 2025

Ce qu’il faut retenir
➡️ Si vous êtes exproprié·e, vous pouvez (et devez) contester l’offre si elle vous semble injuste.
➡️ Mais même si vous ne le faites pas, vous pouvez désormais espérer une indemnisation plus juste, si le commissaire du gouvernement propose mieux.
➡️ Le juge n’est plus une simple chambre d’enregistrement : il a le pouvoir d’évaluer équitablement.
Mon analyse
Cette décision rendue par la Cour de cassation le 9 octobre 2025 (Cass. 3e civ. n° 24-12.637, affaire CACL c/ SCI Goldust immobiliaria) marque un tournant important.
En tant que juriste passionnée, je salue ce revirement de jurisprudence qui rééquilibre les droits en matière d'expropriation. Il permet désormais à un juge d'accorder une indemnité plus juste, même en l'absence de réponse de l’exproprié, à condition que celle-ci ne dépasse pas la proposition du commissaire du gouvernement.
C’est une avancée notable pour les propriétaires souvent démunis face à l’administration : même silencieux, ils ne sont plus automatiquement pénalisés. Cela démontre que le droit n’est pas figé, et qu’il peut évoluer pour mieux protéger les citoyens.
Un arrêt à connaître, à faire connaître… et à intégrer dans toute stratégie de défense en cas d’expropriation.

L’expropriation : quand l’État peut vous obliger à céder votre bien
Cela peut concerner :
- la construction d’un rond-point, d’un pont ou d’une autoroute,
- un projet de voie verte ou d’aménagement urbain,
- l’installation d’un équipement public (école, hôpital, ligne de tram…).
Avant d’être exproprié·e, vous recevez une offre d’indemnisation, censée compenser la valeur de votre bien.
Ce que dit la loi : contester, c’est produire un “mémoire”
- répondre à l’offre de l’État, en proposant une somme plus juste,
- ou produire un mémoire (c’est-à-dire un document écrit transmis au juge), dans lequel vous expliquez pourquoi vous réclamez une autre somme.
➡️ Ce mémoire doit contenir des arguments concrets : prix de marché, état du bien, estimations, diagnostics, etc.
Mais… que se passe-t-il si vous ne répondez pas du tout ? Jusqu’à présent, cela vous faisait perdre toute chance d’obtenir plus que ce qu’on vous proposait.

« Si l’exproprié s’est abstenu de répondre aux offres de l’administration et de produire un mémoire en réponse, le juge fixe l’indemnité d’après les éléments dont il dispose. »

Ce que change la décision du 9 octobre 2025
La Cour de cassation vient bouleverser cette règle.
Même si le propriétaire exproprié n’a pas répondu, ni produit de mémoire en réponse,
➡️ le juge peut quand même lui accorder une indemnité plus élevée,
➡️ à condition qu’elle ne dépasse pas celle proposée par le commissaire du gouvernement.
Dans cette décision du 9 octobre 2025 :
Une société expropriée reçoit une offre de 3 819 € d’indemnité. Elle ne répond pas.
Le commissaire du gouvernement, lui, propose une somme plus juste : 10 830 €.
La cour d’appel accorde cette dernière somme, et la Cour de cassation valide cette décision.
Pourquoi cette décision marque un tournant important
- Le silence du propriétaire était considéré comme une acceptation implicite.
- Le juge devait s’en tenir strictement à l’offre de l’administration, même si elle était manifestement sous-évaluée.
Depuis le 9 octobre 2025 :
- Le juge reprend la main, et peut accorder plus, même sans demande formelle du propriétaire.
- Il peut s’appuyer sur la proposition du commissaire du gouvernement, un expert neutre, qui aide à évaluer au plus juste la valeur du bien.

Une avancée pour la justice… et pour les droits des propriétaires
Cette décision rétablit un équilibre essentiel : l’État peut exproprier, mais pas sous-évaluer un bien sans risque.
Et même si le propriétaire n’a pas eu les moyens ou le temps de répondre, il n’est plus automatiquement pénalisé.
🔍 La justice tient désormais compte d’une évaluation indépendante.

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Valérie FERRAGU
Dirigeante - Titulaire de la carte professionnelle
Loire-Atlantique (44)
Écrit & publié le 4 novembre 2025 par
Valérie FERRAGU
--> Juriste passionnée, Professeure de droit à l’IUT
--> Agent immobilier & Fondatrice de LA BAULE IMMO ici et ailleurs



